Par Me Paul-Matthieu Grondin
Dans une récente décision du Tribunal administratif du travail Drake c. Équipement Trans Continental ltée, un employé refuse de revenir au boulot en présentiel après des mois de télétravail, en raison de la COVID19. Il n’est pas clair s’il y avait entente entre l’employeur et l’employé quant à une continuation du télétravail. Refusant donc de retourner au travail, ce dernier se fait congédier immédiatement.
Le jugement nous rappelle le droit de gérance l’employeur, lui qui peut effectivement demander à tous le travail en présentiel. Ce qu’il ne peut faire par contre, c’est de passer outre la fameuse gradation des sanctions pour mettre fin à un emploi, ce qui est son Waterloo dans la présente affaire.
Ainsi, la plainte en congédiement sans cause juste et suffisante est accueillie.
Voyez ici le passage pertinent:
[24] Le plaignant affirme ne jamais avoir eu l’intention de démissionner de son emploi, mais avoir simplement souhaité que l’entente intervenue concernant le télétravail soit respectée. De plus, compte tenu de son âge et que la pandémie liée à la COVID-19 était encore très présente en mars 2021, il craignait pour sa santé de revenir au bureau en présence.
[25] Nul doute, le plaignant a été congédié. De plus, il a un dossier disciplinaire vierge et sa performance au travail n’est pas en cause.
[26] Rien ne permet toutefois de conclure qu’une entente a été prise relativement à la permanence du télétravail et un vague commentaire verbal à ce sujet ne suffit pas pour en faire la démonstration.
[27] De toute façon, l’employeur dispose d’un droit de gestion qui lui permet d’exiger le retour au travail de ses salariés.
[28] Le plaignant, par son refus, commet une faute, mais elle ne revêt pas la gravité requise pour justifier un congédiement immédiat. Cette insubordination unique ne peut mener à la rupture du lien de confiance immédiat et irrémédiable d’autant plus que le plaignant indique qu’il est prêt à discuter de la situation.
[29] L’employeur, plutôt que de donner suite à cette proposition, le congédie hâtivement sans appliquer une gradation des sanctions qui auraient pu permettre au plaignant de s’amender.
[30] Considérant les dix années d’ancienneté du plaignant, l’absence de mesures disciplinaires antérieures et la gravité modérée de la faute, le Tribunal ne peut conclure que celle-ci peut mener à un bris du lien de confiance. Le président a d’ailleurs témoigné avoir voulu rétablir les choses et avoir proposé au plaignant de revenir.
[31] L’employeur n’a pas démontré, de façon prépondérante, qu’il avait une cause juste et suffisante de congédier Monsieur Drake.