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L’effet combiné de deux fautes sur le possible congédiement d’un programmeur

20 avril 2023

 

 

Par Me Paul-Matthieu Grondin

 

Dans la récente décision du Tribunal administratif du travail Ellenbogen c. Thorburn Flex inc., un programmeur et superviseur est en litige contre son employeur. Le premier allègue avoir été congédié sans cause juste et suffisante, le deuxième allègue que le premier a démissionné ou, subsidiairement, qu’il aurait été congédié pour faute grave.

La première faute est à l’effet de la décision du travailleur de poursuivre ses vacances pour une journée supplémentaire. Il se fait aussi reprocher une altercation avec son employeur.

Pour les fins de ce billet, nous passerons outre l’argument de l’employeur quant à la démission de l’employé – ce qui nous intéresse est la théorie des fautes cumulées menant à une faute grave. Dans le cas qui nous occupe, l’employeur avait relevé les deux fautes, les avait sanctionnées de façon disproportionnée (la trame factuelle dans le jugement est élaborée) et avait tout de même proposé une façon à l’employé de conserver son lien d’emploi.

Le juge retiendra que chacune des sanctions des fautes représente une instance distincte de congédiement déguisé. L’employé, qui n’est pas sans tort, sera finalement suspendu sans solde pour cinq semaines.

Voyez dans les mots du juge :

 

[171]   L’employeur allègue que le cumul des fautes d’insubordination lui permet de passer outre à la gradation des sanctions, surtout dans le contexte d’une petite entreprise familiale composant avec des équipes restreintes, aux prises avec des échéanciers serrés. Il dispose enfin de règles précises connues et acceptées de tous. Tout cela justifie de passer outre à une gradation, selon lui.

[172]   La jurisprudence est toutefois très claire. En l’absence de faute grave ou d’incident culminant, l’employeur ne peut écarter la progression des sanctions. Ici, le Tribunal considère que le plaignant n’a pas commis de faute grave.

[173]   L’employeur n’a pas démontré que seul le congédiement est approprié. En effet, il s’agit des premières fautes documentées du plaignant en près de 25 ans. Jusqu’à l’été 2018, il bénéficie d’une grande autonomie et d’une grande confiance de la part de l’employeur. De même, sa compétence n’a jamais été remise en doute. Il a toujours été loyal au service de l’employeur. Il était d’ailleurs au service de l’entreprise avant l’arrivée du président actuel.