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Confirmation de la Cour d’appel quant à l’inclusion des plans de rétention dans les indemnités de départ

5 juin 2023

 

 

Par Me Paul-Matthieu Grondin

 

Dans la cause de la Cour d’appel du Québec, Lareau c. Centre du camion Gamache inc., un directeur des ventes chevronné porte en appel une décision de la Cour supérieure qui rejette sa demande, à savoir qu’il a été congédié de façon déguisée.

La trame factuelle est touffue, mais tentons de la résumer succinctement – nos excuses à l’avance aux parties. Ledit directeur des ventes voit son poste aboli de façon concurrente avec un congé de maladie, mais aura un nouveau contrat de travail à son retour. L’employeur respecte plus ou moins le nouveau contrat, et les relations entre l’employé et l’employeur connaissent plusieurs heurts. L’employeur modifiera des politiques de vente, il y aura des escalades verbales et même physiques, et l’employé n’aura accès aux chiffres de la compagnie (pour calculer ce qui lui est dû) qu’après des démarches en cour. L’employé se déclare congédié de façon déguisée et demande 24 mois en guise d’indemnité de départ, ainsi que plusieurs sommes lui étant dues.

Comme nous l’avons vu dans des billets précédents au même sujet, l’appelant obtiendra ici 18 mois en indemnité de départ. Les questions se posent alors à savoir ce que comprend ce montant de 18 mois – la règle générale étant celle de la rémunération complète. Or, dans le cas du directeur des vente, un plan de rétention allait trouver son terme pendant la durée de l’indemnité de départ de 18 mois, ce dont il doit alors bénéficier.

Voici la façon dont la Cour d’appel en discute :

 

[136]   Tel que mentionné précédemment, la clause 6.3 du contrat de travail de l’appelant prévoit qu’il a droit à une participation aux profits de l’entreprise (Centre du Camion Gamache et Gamex). Pour la période entre le 1er octobre 2014 au 28 février 2015, il est prévu qu’il a droit à une indemnité de 5 % des profits avant impôts de l’entreprise. Du 1er mars au 31 décembre 2015, c’est à une indemnité de 2,5 % des profits avant impôts de l’entreprise à laquelle il a droit et, enfin, en 2016, l’appelant n’aura plus aucune indemnité quant à une participation aux profits de l’entreprise à moins d’une entente écrite entre les parties à cet effet.

[137]   Quant à la clause 6.4, elle prévoit que l’employeur remettra à l’appelant, en avril 2015, les sommes lui étant dues, soit le remboursement complet des primes payées pour l’assurance maladie grave, incluant la prime de 2014, le versement complet des sommes incluses dans le plan de rétention (solde des montants accumulés depuis 2011), ainsi que le versement des corrections du salaire de base et des commissions depuis le 1er février 2015 à ce jour[65].

[138]   Aux paragraphes 95 et 96 du jugement, la juge conclut que l’appelant ne peut réclamer, en vertu de la clause 6.3, la participation aux profits avant impôts de CCG, puisque le plan de rétention ne s’applique plus. Cette conclusion n’aurait été exacte que dans la mesure où le départ de l’appelant constituait une démission.

[139]   Ayant conclu que la juge a erré en ne qualifiant pas son départ comme un congédiement déguisé, il faut appliquer l’article 2092 C.c.Q. et considérer que l’appelant aurait été à l’emploi de CCG pendant son délai de congé de 18 mois et qu’il aurait bénéficié de son plan de rétention[66]. Par conséquent, les dommages doivent correspondre à ce qu’il aurait dû gagner pendant la période de délai de congé, et, pendant cette période, l’appelant doit être considéré comme s’il était toujours en poste, de sorte que l’employeur ne peut invoquer une clause contractuelle qui imposerait comme condition que l’employé soit toujours en poste[67].