Par Me Paul-Matthieu Grondin
Dans la cause très récente du Tribunal administratif du travail Maillet c. Xerox Canada inc., deux directrices montréalaises d’une multinationale de l’impression se déclarent congédiées de façon déguisée alors qu’on leur demande de signer un nouveau contrat de travail pour un sous-traitant qui s’occupera dorénavant des tâches qui leurs étaient imparties, suivant une concession de l’employeur en place.
Employées de longue date, elles refusent de signer le nouveau contrat, arguant qu’il contient des clauses qui semblent être contraires aux normes du travail, notamment quant à la protection donnée en cas de congédiement sans cause juste et suffisante.
Lorsque les négociations entourant le contrat de travail achoppent, elles sont remerciées de leurs services, l’employeur ayant jugé qu’ils n’avaient pas accepté le nouveau contrat de travail, celui-ci semblant par ailleurs généralement conforme à l’emploi qu’elles occupaient précédemment, que ce soit en tâches, en salaire, en horaire ou en ancienneté.
Le juge administratif donnera raison à l’employeur. Quant aux relevés d’emploi contenant des informations inexactes, on ne s’en formalise pas outre-mesure.
Voyez la façon dont le juge motive sa décision :
[66] Pour le Tribunal, les conditions offertes par HCL ne permettent pas de conclure que les plaignantes ont été victimes d’un congédiement déguisé de la part de Xerox. Quant aux mentions apparaissant sur les relevés d’emploi, elles ne correspondent pas à la réalité et le Tribunal n’est pas lié par les inscriptions y apparaissant. Son rôle vise plutôt la recherche de la vérité en fonction de l’ensemble de la preuve.
[67] Or, celle-ci démontre que les conditions de travail essentielles que les plaignantes avaient chez Xerox leur ont été offertes intégralement ou presque. On leur dit qu’elles feront le même travail de gestion, dans les mêmes lieux. On reconnait leurs années de service acquises chez Xerox. De plus, elles conservent le même salaire, les mêmes droits de vacances et une prime de performance similaire. Leur nouveau contrat de travail n’était pas contraire à l’article 124 de la LNT puisqu’une autre disposition de ce contrat prévoyait que toute norme minimale d’une autre législation en matière d’emploi qui serait plus favorable s’appliquerait, sans affecter la validité du reste du contrat.
[68] Certes, quelques éléments diffèrent de ceux prévalant avant la réorganisation de Xerox, par exemple, la possibilité qu’elles travaillent en dehors des heures normales de bureau, la possibilité que HCL enregistre les communications électroniques faites dans le cadre du travail, ou encore, l’obligation pour les employés de se consacrer exclusivement aux affaires de HCL pendant les heures d’ouverture. Toutefois, une personne raisonnable, se trouvant dans la même situation que les plaignantes au moment de l’offre, aurait considéré que ces éléments sont insuffisants pour conclure à une modification substantielle des conditions de travail essentielles des plaignantes[33].
(…)
[73] En somme, les conditions offertes par HCL ne constituent pas un indice de congédiement déguisé. De plus, leur licenciement ne camoufle aucun subterfuge visant à se départir d’elles. Comme elles ont véritablement été licenciées, les plaignantes ne peuvent se prévaloir du présent recours. Les plaintes selon l’article 124 de la LNT sont donc rejetées.